L'histoire de l'écriture méditerranéenne et occidentale
L'alphabet en lettres hébraïques est l'un des nombreux alphabets qui furent et sont écrits autour du bassin méditerranéen et en occident. L'homme écrit depuis six mille ans à peine mais l'écriture a transformé le genre humain. Elle a permis une transmission des connaissances par-delà les cultures et les générations et a entraîné une accélération des changements culturels qui ont laissé loin derrière eux l'évolution biologique. L'écriture reste liée au langage oral qui l'a précédé dans le temps et les rapports qu'entretiennent langage oral et langage écrit diffèrent profondément dans les diverses civilisations.
Jusqu'à présent, ont été beaucoup étudiés :
- les systèmes de signes graphiques utilisés dans les diverses civilisations.
- les objets écrits. Les spécialistes d'égyptologie et d'assyriologie, d'épigraphie et de papyrologie grecque et latine ont, depuis des siècles, réuni des corpus; ils les ont déchiffrés, classifiés et scrutés, établissant le tracé des caractères, l'histoire des alphabets et de leurs lettres, replaçant les pièces écrites dans le temps et l'espace.
L'objet écrit est le témoin de l'écriture et de la lecture mais ces deux activités sont bien différentes. La lecture se constitue à partir des traces écrites, sans les changer en aucune manière. Elle se répète autant de fois qu'on le désire, à tous les rythmes désirés, à des vitesses inégales; elle est sélective et discontinue. Le plus souvent, elle met en jeu seulement les mouvements des yeux et de la tête. La lecture ne laisse pas de traces : pour qu'on sache qu'elle a eu lieu, il faut que l'écriture en témoigne.
L'histoire des écritures méditerranéennes et occidentales, conçue du point de vue de la lecture, a suscité de nombreuses recherches.
L'histoire de l'acte d'écrire et des circonstances qui l'entourent n'avait pas encore été faite. L'écriture est différente de la lecture : c'est un acte dynamique, qui se déroule dans un espace en trois dimensions, dans un temps unique, homogène et linéaire. Les mouvements du corps du scripteur, ceux de la main guidés par l'oeil, suscitent et accompagnent la trajectoire de l'instrument dans l'espace, trajectoire qui laisse des traces sur la surface de la matière utilisée, quelle qu'elle soit.
Cette histoire a été faite avec l'aide de physiciens et de médecins, et elle a réservé bien des surprises. Un seul exemple : j'ai pu montrer que ce sont les mouvements et la posture du corps humain écrivant, le matériau et la forme du livre mais aussi l'instrument utilisé et la forme des lettres qui expliquent pourquoi les hébreux et les arabes écrivent l'alphabet de droite à gauche alors que les grecs et les latins l'écrivent de gauche à droite. C'est une question que se posaient les grecs il y a 2500 ans !